The Beatles

L'actu me fait réaliser que sur ce forum, aucun sujet consacré aux Beatles n'avait jamais été ouvert, ce qui semble une hérésie si on considère que Kate Bush et pas mal de représentants de la pop anglaise sont un peu le fil conducteur de notre petite communauté... Le problème est donc réglé! Ce qui peut nous donner l'occasion d'échanger sur LE groupe majeur de la pop mondiale ayant incontestablement inspiré la plupart des artistes du Royaume-Uni et d'ailleurs dont Madââââme, bien-sûr! Bowie étant l'autre grande référence en ce sens, de façon plus mineure cependant...

Alors, pourquoi parler des Beatles aujourd'hui? Une gigantesque opération commerciale présentée comme un évènement qui a tout de même comme conséquence le retour du groupe en tête des charts anglais depuis 54 ans.
En 1995, la sortie de "The Beatles Anthology" (compil et surtout magnifique, à la limite de l'indispensable, docu en 8 épisodes) avait servi de prétexte à la découverte de deux titres inédits, à l'origine issus de bandes composées et enregistrées par Lennon en 1976, mais finalisées par les 3 membres encore vivants (dont George Harrison) "Free as a bird" et "Real Love" qui avaient donc servi de promotion à la dite anthologie:





"Free as a Bird" était apparu comme un titre typiquement Beatles, servi par un clip extrêmement réussi et émouvant, jouant à fond sur la nostalgie et les références évidentes à plusieurs chansons des Beatles alors que "Real Love" était plus spécifiquement "lennonesque" mais faisait la part belle aux histoires d'amour des 4 membres.

Or, un 3e bande, peu exploitable techniquement à l'époque, "Now and Then", avait été remisée à l'écart pour cette raison, en attendant que les progrès technologiques permettent d'en faire qq-chose d'acceptable. Malheureusement, entre-temps, la disparition de George Harrison a empêché sa participation au projet. Ce sont donc les 2 "rescapés" qui s'y sont collés. Encore une fois, le titre est illustré d'un clip jouant la carte nostalgique à grand renfort de l'intelligence artificielle qui commence à être utilisée à donf' dans de plus en plus de projets de ce type (ABBA...):



Et pour que l'opération soit la plus lucrative possible, cette sortie est accompagnée de la réédition des légendaires compils bleue et rouge (absolument superbes dans leurs versions vinyles colorées, et, bien-sûr, méga chères, toutefois pas dans les excès bushiens) sous différents formats (coffrets ou individuels, 3 vinyles, 2 cds):



Concernant le titre inédit, les critiques sont plutôt (légitimement car c'est très très moyen effectivement) réservées.

2 articles, un en anglais mentionnant KB et un en français pour compléter tout ça...

Du coup, j'ai pensé que ça pourrait servir de base à une discussion éventuelle sur le rapport qu'on entretient avec l'oeuvre inévitable des "Fab' Four". Pour l'instant, je m'arrête là, mais je témoignerai...

Quelques précisions sur l'intérêt de cette réédition qui peut paraître superflue quand on a déjà ces 2 volumes (ce qui est mon cas sous format cd) et qui explique pourquoi on passe (pour chaque volume) à 3 disques au lieu de 2: outre l'ajout de ce nouveau titre "Now and then" qui serait minimal pour attirer le gogo, non seulement la compilation a été agrémentée de nouveaux titres (déjà connus), mais l'ensemble des titres provient de différents mixages (l'oeuvre des Beatles n'a cessé de subir diverses remasterisations et remixages depuis des lustres par différents "acteurs" comme, bien-sûr  et légitimement George Martin, l'ingénieur du son déterminant pour l'évolution du groupe à tel point qu'ils ne seraient pas devenus ce qu'ils sont sans son apport, mais aussi plus récemment son fiston).

Cet article résume "l'intérêt" (pour les puristes, moi, je me contenterai de ma version déjà remasterisée en 2010 par différents techniciens dont Guy Massey qui a, je crois, bossé pour KB) de cette réédition modifiée. Pour ceux qui veulent les détails pour chaque titre, tout est précisé sur le site de Super Deluxe Edition qui a aussi réalisé une "unboxing vidéo" commentée pour illustrer tout ça:



On peut se demander pourquoi, cette fois, je m'implique un peu dans une info concernant une réédition des Beatles alors que c'est une activité redondante (et très lucrative!!!) d'EMI depuis des lustres. Je crois que pour toute personne désirant aborder pour la première fois l'oeuvre des Fab'Four et ne sachant pas trop par où commencer, ces "albums bleu et rouge" constituent une porte d'entrée idéale pour avoir une assez bonne idée de cette évolution remarquable. Tellement de gens à partir de ma génération) ont commencé par ça. Ce fut mon cas avec ces deux albums que mon ami d'enfance m'avait fait "découvrir" (moi, à cette époque, c'était ABBA... ). A l'époque, ça m'avait moyennement motivé. Il faut dire qu'à travers la radio, j'avais déjà grandi avec tout ça sans m'en rendre compte et les chansons des Beatles ne constituaient en rien un "capital" à découvrir réellement... J'en reparlerai.

J'ai donc écouté, par curiosité, le "blue album", étant plus intéressé par la période plus tardive des Beatles que celle des débuts, même si le Red Album contient des chansons de "Rubber Soul" et "Revolver", 2 albums que j'aime beaucoup. Mais, pour moi, l'aventure commence vraiment avec "Sgt. Pepper's...", se poursuit avec "Magical Mystery Tour" et "The White Album". Après ("Abbey Road" et "Let it Be"), de nouveau, je suis plus mitigé... Après, dans toutes les périodes, je m'y retrouve au niveau des singles car j'ai grandi avec ça grâce à la radio, comme je l'expliquais précédemment...

Bilan des courses à l'issue de cette écoute: Il faut prendre en considération que ce double compile des titres issus de 5 albums connaissant une évolution très importante (bien davantage que le rouge) pendant laquelle les 4 membres vont peu à peu prendre leur place, alors qu'auparavant, c'était surtout Lennon/McCartney qui tiraient leur épingle du jeu, ce qui avait pour conséquence une homogénéité plus importante. Pour le double-bleu, ça part tous azimuts, d'autant plus que George Martin, en tant que génial ingé du son, a pris de plus en plus d'importance au sein du groupe, sans compter que l'évolution des progrès techniques d'enregistrement favorisait grandement les tentations expérimentales. C'est donc, à la base, une compilation beaucoup plus riche et hétéroclite que la précédente.
Le problème, c'est que s'ajoute à cela un phénomène qui accentue cette extrême hétérogénéité: les différents titres sont issus de diverses remasterisations et remixages récents (2015, 17, 18, 19, 21, 23) réalisés par différentes équipes et "maîtres d'oeuvre". Du coup, on en ressort avec une impression de quasi malaise face à qq-chose qui nous rapproche parfois d'une véritable incohérence. Certaines productions fonctionnant beaucoup mieux que d'autres, d'autant que certains remixages prennent parfois pas mal de libertés avec les enregistrements d'origine, pour le meilleur, comme pour le pire.
On a donc finalement la désagréable sensation que le but de l'opération n'était pas de regrouper une oeuvre, mais plutôt un moyen de compiler davantage des performances techniques de laborantins de studios et ça devient plus le travail collectif de techniciens que d'artistes créateurs, donnant à l'auditeur la nausée d'un gloubiboulga sonore.

Du coup, sur l'ensemble, je n'ai pas du tout apprécié l'expérience.

En revanche, ça m'a donné l'occasion de connaître le travail de remixage de Gilles Martin (le fils de George, qui avait déjà oeuvré de façon intéressante sur "Sgt. Pepper's...") sur le double-blanc, album que j'aime BEAUCOUP (justement pour son extrême diversité de styles, à la lisière, parfois, de l'incohérence, mais comme "The Dreaming", ça fonctionne!) et j'ai été tellement impressionné par ce que j'ai entendu que j'ai décidé d'embrayer sur cette version 2018 du "White Album" que je n'avais jamais entendue:



De tous les remasters (tous les albums) et remixages (3) qu'il m'ait été donné d'entendre, j'avoue que c'est la refonte à la fois la plus impressionnante techniquement, mais peut-être aussi la plus "iconoclaste" car Gilles Martin a pris tellement de libertés avec l'enregistrement d'origine qu'on a l'impression d'écouter un autre album (j'exagère un peu, mais quand-même...). C'est à la fois très satisfaisant car le travail sonore effectué est absolument remarquable, la plupart des chansons étant transfigurées, "boostées" au niveau de l'énergie jusqu'à les rendre incroyablement modernes. Cependant, devant une telle débauche d'effets (sur certaines chansons en particulier, comme "Dear Prudence" ou "Helter Skelter". Sur "Revolution 9", c'en est presque nauséabond!), on ne peut s'empêcher de penser à une trahison de l'oeuvre initiale (même si le résultat semble avoir reçu l'aval des 2 survivants et de la grande prêtresse). C'est assez perturbant, et on en ressort un peu "choqué". Heureusement, "Blackbird" (une de mes chansons préférées des Beatles) semble n'avoir subi qu'un très beau nettoyage. Après l'écoute, j'étais très partagé, entre bluffé par la performance technique (sacré boulot!) et gagné par une sorte de nostalgie un peu malsaine...

Cette refonte est sans aucun doute la plus radicale qu'il m'ait été donné d'entendre, à la fois époustouflante et frustrante.

Je serais très curieux d'entendre l'avis de ceux qui aiment particulièrement cet album et de leur expérience de ce remix 2018. Si ce n'est fait, je vous conseille vraiment de vous pencher dessus.

En tout cas, pour le double-bleu, je déconseille vraiment...

C'est cool d'avoir (enfin) ouvert ce sujet sur les Beatles, Pierre ! On avait carrément zappé pendant toutes ces années, il faut croire…

Je fais partie de la multitude de gens ayant commencé à les écouter avec les compilations rouge et bleu. Je devais avoir environ 8 ans (début des eighties). J'ai vite trouvé la période 67-70 plus intéressante, et c'est d'ailleurs à cette époque que j'ai aussi écouté l'album blanc. Un sacré choc, évidemment !

Je me suis procuré les fichiers FLAC haute qualité de ces "éditions 2023", et j'ai entièrement écouté le rouge tout à l'heure. Cela sonne en effet un peu plus "moderne" et clair, mais j'ai rarement été gêné par les changements. J'ai seulement commencé l'écoute du bleu, où les modifications semblent en effet plus radicales (pas vraiment pour le meilleur). Je verrai à la fin si je suis aussi sévère que toi…

A propos de l'album blanc; j'avais acheté la version 3 CD de 2018, qui comprend aussi les "Esher Demos". La production de Giles Martin m'a étonné, mais je l'ai trouvée très adéquate pour un album pareil, qui part en effet dans tous les sens. La "modernisation" du son ne m'a pas du tout gêné. Il faudra que je le réécoute, pour voir ce que j'en pense aujourd'hui…

Ludovic a écrit:C'est cool d'avoir (enfin) ouvert ce sujet sur les Beatles, Pierre ! On avait carrément zappé pendant toutes ces années, il faut croire…

Oui, avant de poster, j'ai cherché partout le sujet, convaincu qu'il y en avait déjà un... En fait, on avait déjà dû tout se dire sur le forum de Lulu et comme l'actualité des Beatles se résumait (logique!) aux rééditions successives depuis les remasters en 2009, on a dû utiliser plutôt le sujet "Qu'écoutez-vous en ce moment?". Bon, la bourde est réparée, le forum KB a de nouveau son sujet Beatles, en toute logique, leur travail constituant une influence évidente sur celui de KB, comme elle l'a revendiqué au début de sa carrière, alors que c'est un peu plus tard que ça apparaît vraiment, sans que ce soit pour autant si flagrant. Je pense que ce sont plutôt les compos de McCartney qui le font apparaître davantage. En écoutant cette réédition de double blanc, la relation avec "The Dreaming" m'a rapidement sauté aux oreilles pour la première fois au point que je me suis dit que ce serait vraiment intéressant que ce Giles Martin entreprenne un remixage de "The Dreaming" (avec le contrôle de Madââââme, of course!). Je crois que ça pourrait avoir de la gueule!

Ludovic a écrit: Je verrai à la fin si je suis aussi sévère que toi…

Je ne me sens pas si sévère. Le fait que ce retour perpétuel sur les enregistrements des Beatles constitue un véritable business bien lucratif ne me semble pas un délire de ma part. Les rééditions remasterisées de 2009 supervisées par George Martin ainsi que l'anthologie (surtout ce superbe docu en 8 volets, irréprochable même s'il servait en quelque-sorte à une forme de réhabilitation de Yoko Ono et à un "lissage" des conflits entre les Fab'Four pour créer une sorte de légende plus acceptable) étaient tout à fait justifiées, nécessaires et vraiment réussies. Depuis, je trouve que c'est un business propice à des critiques légitimes. Pour le double-bleu, je trouve ça, effectivement, un peu abusif. Un peu comme si on décidait de relooker la Joconde en pouffe de téléréalité au lieu de simplement la restaurer. Je m'apprête à écouter:



Je pense, a priori, que ce devrait être moins bordélique. Mais, en attendant, j'ai voulu me pencher de nouveau sur le remixage de:



Pour le coup, je le trouve assez équilibré. Je l'avais déjà écouté par curiosité et bien aimé. Mais quand j'écoute les Beatles, j'utilise surtout les remasters de 2009 (stereo) en cds. Sauf pour Sgt. Pepper's pour lequel j'alterne les différentes versions que je trouve toutes réussies, y-compris le remixage de Giles Martin. J'adore cet album inconditionnellement, il faudrait vraiment un sale boulot pour que je le rejette...

Ludovic a écrit:A propos de l'album blanc; j'avais acheté la version 3 CD de 2018, qui comprend aussi les "Esher Demos". La production de Giles Martin m'a étonné, mais je l'ai trouvée très adéquate pour un album pareil, qui part en effet dans tous les sens. La "modernisation" du son ne m'a pas du tout gêné. Il faudra que je le réécoute, pour voir ce que j'en pense aujourd'hui…

Je ne pense pas être "gêné" mais plutôt "partagé" car c'est vraiment impressionnant! C'est vrai qu'une telle audace est tout à fait indiquée pour cet album particulier, si aventureux. C'est un peu comme si le fait de s'autoriser tout ça était cohérent avec la volonté initiale qui a guidé l'enregistrement de cet album. Mais sur certains titres, ça change tout de même ma perception. Par exemple, le côté vraiment cra-cra d'"Helter Skelter" qui annonce le punk devient, avec ce remix, davantage un morceau de Heavy Metal et ça me perturbe un peu. Mais pourquoi pas? J'ignore si on peut vraiment parler de réussite d'un point de vue artistique, mais techniquement, c'est effectivement sidérant. Je pense que plus tard, je me prendrai le cd...

Bon, je me suis penché sur le cas du "double rouge", un peu par acquit de conscience parce-que, comme je le disais, la premier disque compile la première période des Beatles qui ne m'a jamais intéressé (ce truc plutôt rock'n roll des 50's, assez basique, sans réelle personnalité même si, indéniablement, ils réussissent à se trouver une identité dans ce style malgré tout...). Seule "Yesterday" trouve grâce à mes oreilles sur cette première moitié (si Myriam me lit, elle doit me maudire...   ). Pour le deuxième disque, comme je venais d'écouter la version 2022 de "Revolver", j'ai zappé "Help" (bof! ) et je me suis donc concentré sur les remixes 2023 du 2e au 11e titre (donc la période "Rubber Soul" en gros).

Globalement, d'un point de vue sonore, c'est beaucoup plus cohérent que le bleu, la plupart des remixages étant du même cru (2023) et ceux de 2022 ("Revolver") n'ayant pas été particulièrement révolutionnaires. Je trouve que sur l'ensemble, c'est mixé de façon très "sèche", mate, une tonalité "haute" étant préférée au détriment des basses, pas très exploitées, contrairement aux éditions de 2009, beaucoup plus équilibrées. Ca me conforte donc sur le fait que cette nouvelle réédition, pour des raisons complètement différentes d'un album à l'autre, ne me convient pas du tout, j'en resterai à mes éditions de 2009 assez parfaites et l'ajout de titres bonus (présents dans mon intégrale) n'ajoute, à mon sens, rien à cette réédition, bien au contraire. Mes a priori qui consistaient à penser que cette réédition était un piège à gogos est confirmée. Ce n'est pas, pour moi, du bon boulot et, au vu des prix exigés, un beau foutage de gueule....
J'ai regardé quelques "reaction videos" de gros fans des Beatles que j'ai choisis plutôt "vieux" pour avoir une idée de leur jugement et , pour la plupart, je les ai sentis incapables d'objectivité (ce que je peux comprendre), qqs-uns étaient tout de même assez critiques, du moins sur certains aspects ou titres). En tout cas, à aucun moment je n'ai relevé un réel enthousiasme.
Au moins, ça m'aura permis de connaître ce remixage du double-blanc sur lequel je vais de nouveau me pencher car il me paraît revêtir un intérêt certain.

De toutes façons, mon intérêt envers les Beatles, très tardif, est finalement assez limité et se concentre principalement sur quelques albums (5). J'ADORE "Sgt. Pepper's..." que je considère comme un album essentiel et que j'écoute très régulièrement. "Magical Mystery Tour" est une sorte d'extension du précédent (une sorte de "Lionheart"), mais je l'écoute un peu moins. "Rubber Soul" et "Revolver" marquent un vrai tournant et dans ces 2 albums, il y a pas mal de petites merveilles et puis ce double-blanc, album à la fois passionnant et bancal, d'une richesse incroyable concernant la diversité des styles et la nécessité pour chacun des membres d'afficher sa personnalité. Un album à la fois très critiqué et adulé. Pour moi qui fuit généralement le consensus, cet album a tout pour me plaire (sauf "Revolution 9" que je trouve assez insupportable mais qui a sa place, c'est juste trop long! ). J'ai conscience que le fait de n'avoir pas vécu "l'expérience Beatles" en temps réel m'empêche de les apprécier à leur juste valeur. J'ai toujours eu l'impression d'avoir loupé le coche, d'autant plus que j'ai vraiment retardé le processus. Ca ne m'a cependant jamais empêché de comprendre que c'était LE groupe déterminant et essentiel de l'histoire de la pop. Je ne parviens même pas à imaginer l'évolution de la musique populaire du 20e siècle sans leur apport.