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Message  Pierre Lun 1 Juin - 20:42

Tiens... Je croyais avoir ouvert un sujet consacré à ce groupe qui n'en est pas un...

En fait, je viens d'apprendre la disparition de Vaughan Oliver, le graphiste responsable de toute l'esthétique du label 4AD, et tout particulièrement de la trilogie de This Mortal Coil dont le superbe design restait le seul moyen de forger une identité à ce collectif fluctuant. En réalité, celle-ci n'est déjà plus d'actualité, étant survenue le 29 décembre 2019, d'où la création de ce sujet plutôt que son inclusion dans le sujet "R.I.P."... "LIBERATION", en guise d'hommage, lui avait consacré un article:

Disparition

Mort de Vaughan Oliver, graphiste historique du label 4AD
Par Charline Lecarpentier — 30 décembre 2019 à 19:11

L'artiste, qui avait marqué l'industrie musicale britannique en créant de nombreuses pochettes d'albums, est mort le 29 décembre à 62 ans.

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Vaughan Oliver, en 2016. Photo Luca Giorietto



Vaughan Olivier a changé la face du graphisme musical britannique, incarnant visuellement une musique elle-même des plus énigmatiques. Cocteau Twins, Lush, The Breeders, Dead Can Dance, Modern English, This Mortal Coil ou encore The Pixies, dont on se remémore la pochette de Doolittle, second album sorti en 1989 avec ce singe auréolé comme extrait des paroles de Monkey Gone to Heaven. Son portfolio ne s’arrêtait pas aux années 80 : Scott Walker, TV on the Radio, ou encore David Lynch avaient fait appel à son travail aussi puissant sur un plan typographique que plastiquement sombre, laissant deviner les textures de pochettes comme conçues pour être caressées, et dont on déplore définitivement la réduction en une minuscule icône sur smartphone.

Le destin de Vaughan Oliver s’est imbriqué dans l’histoire du label 4AD qu’il avait rejoint en 1983 avec des visuels reconnaissables entre mille, réalisés en binôme (sous le nom 23 Envelope) avec le photographe Nigel Grierson. Après le départ de celui-ci, il devint V23, embarquant différents talents dans son collectif. Ensemble, ils imposèrent une utilisation originale de la typographie et un style viscéral, industriel, gothique qui contribua largement à l’aura d’albums majeurs de l’époque. Le fondateur de 4AD, Ivo Watts-Russell, a honoré sa mémoire sur le site du label, évoquant leur mission commune pour «transcender la médiocrité», le remerciant de lui avoir «appris comment regarder le monde physique». Une monographie publiée en 2000 et des rétrospectives, dont la première à Nantes en 1990, avaient permis aux fans de mettre un nom sur ces pochettes chéries. Vaughan Oliver était devenu enseignant, entre autres à l’université des arts créatifs d’Epsom, mais sa haute influence s’exerce toujours dans les bacs à disques qui résistent, comme celle d’un Peter Saville (Factory Records) ou de Roger Dean (Yes et toute la vague prog-rock), qu’il admirait particulièrement. Issu de la classe ouvrière, Vaughan Oliver vantait au site Designboom la puissance des visuels d’album : «C’était une façon démocratique de découvrir l’art. Le disquaire local était une galerie d’art pour moi.»
Charline Lecarpentier

Ce qui me donnera l'occasion d'illustrer ce sujet par toutes ces pochettes magnifiques qui embellissent ma discothèque depuis les années 80. Je profite pour rappeler que j'avais acheté "Treasure" de Cocteau Twins et "It'll end in tears" de TMC juste pour la beauté des pochettes, sans avoir jamais entendu un son de la production 4AD. C'est ainsi que j'ai découvert, non seulement This Mortal Coil, Cocteau Twins, mais aussi Dead Can Dance Le Mystère des Voix Bulgares et une quantité d'autres choses... Je n'ai pas été déçu! Je dois donc beaucoup à ce monsieur, sans qui je serais peut-être passé à côté d'émotions musicales intenses et de concerts mémorables. Merci à lui.

LES INROCKS lui ont, bien-sûr, rendu hommage:

Hommage à Vaughan Oliver, créateur de rêves
06/01/20 16h49

Graphiste et designer iconique ayant marqué au fer rouge l'identité visuelle du label indépendant 4AD, le Britannique Vaughan Oliver, auteur des pochettes de disques cultes signés Pixies, Cocteau Twins ou encore The Wolfgang Press, est mort le 29 décembre dernier. Retour sur un parcours emblématique.

De la même manière que Francis Wolff fut l’image de Blue Note (Thelonious Monk, Herbie Hancock, John Coltrane…), que Pedro Bell fut celle du P-Funk (Parliament et Funkadelic, les deux groupes de George Clinton), ou que Peter Saville fut celle de Factory Records (New Order, Happy Mondays, A Certain Radio…), le graphiste et designer britannique Vaughan Oliver, décédé cette semaine à l’âge de 62 ans, a vu son histoire intimement liée à celle du label londonien 4AD (Cocteau Twins, Pixies, Dead Can Dance…), dont il fabriqua l’identité visuelle pendant plus de 20 ans. Une carrière liée à un label, et à un homme d’abord, Ivo Watts-Russell.

Vague punk

La rencontre entre les deux Britanniques se fait à Londres, au début des années 80, dans une Angleterre plongée dans la vague punk qui a vu la déferlante Sex Pistols, The Fall, Buzzcocks et même Joy Division changer, ici et ailleurs, considérablement la donne. Vaughan Oliver lui aussi, a vu la vague venir, mais d’assez loin : il est originaire de Sedgefield, dans le comté de Durham — clairement working class culture — à des années-lumière de l’exigence culturelle et sociale de la capitale londonienne, et bien loin même, niveau énergie urbaine du moins, de ce qui se passera à Manchester via le label Factory à partir de 1978.



Attiré par le surréalisme pictural de Dali, par celui de Roger Dean (l’homme derrière les images du groupe Yes), puis, plus tard, par celui, cinématographique, de Lynch, il atterrit à Newcastle, plus au nord encore, à deux pas de la frontière écossaise, pour y étudier à la conception graphique. Et puisque dans les 80’s comme aujourd’hui, le travail, ce n’est pas tellement dans le nord de l’Angleterre qu’on en trouve le plus, il parvient au terme de ses études à déménager à Londres, pour tenter d’appliquer sur le terrain ce qu’il a appris sur les bancs de l’école. Il est alors âgé de 21 ans, et est le détenteur d’une culture graphique qui, avouera-t-il plus tard, n’allait même pas alors jusqu’au Bauhaus, le mouvement allemand qui a pourtant eu sa petite importance en matière de design graphique européen…

À Londres, il trouve pourtant rapidement un travail dans le packaging, puis un autre pendant deux ans avec Michael Peters, designer qui s’est spécialisé dans le marketing commercial. Pour lui, ça fonctionne, mais cette vie-là ne le passionne pas. Traîner en concert lui sauvera la mise. Et bouleversera son existence.

Adepte de musique rock et déjà pourvu d’une discothèque personnelle solide (les pochettes de disques ont été, pour lui comme pour beaucoup d’adolescents post 60’s, sa première véritable confrontation avec les arts visuels en même temps que sa galerie d’art personnelle), Vaughan croise régulièrement en concert un jeune mec de la musique, Ivo Watts-Russell, qui vient de lancer, via la maison-mère Beggars Banquet, le label 4AD, marqué rock et qui sera, bientôt, associé au plus exigeant de la musique britannique noise pop, new wave, dream pop, shoegaze. Peter Kent, affilié lui aussi à l’origine à 4AD, a pour sa part déjà quitté l’aventure, direction Situation Two, soutenu là encore par Beggars. Ensemble, Ivo et Oliver discutent parfois musique, un peu de graphisme et bientôt, un intérêt commun voit le jour. 4AD a besoin d’un travail visuel affirmé, et Vaughan d’un nouveau boulot ? Les planètes, sur ce coup-là, paraissent alignées. Ça vaut le coup d’essayer.



Trouver, pour le label, une identité immédiatement reconnaissable, tout en ne galvaudant pas celle, propre, aux groupes eux-mêmes ? Plus facile à penser qu’à réaliser. Sauf que c’est précisément, et en dépit d’une absence totale d’expérience sur le sujet du principal intéressé, ce qui se produit. Vaughan est engagé par 4AD, dont il deviendra même le premier salarié — il se détachera de cet engagement plus tard, préférant les libertés offertes par le statut de freelance — et débutera avec le label une collaboration qui ne cessera jamais vraiment. Gathering Dust de Modern English : son premier travail en 1980 pour 4AD montre un couple proche d’un téléviseur qui occupe une bonne partie de l’espace rougeoyant de la pièce, alors que Mesh & Lace (toujours Modern English, en 1981) propose cette image, troublante, d’un homme attaché, le torse nu et les yeux bandés dans ce qui semble être un hangar. Au-dessus de lui, pendue au mur, une sardine. On parlait de Dali, de Lynch et de surréalisme ? On est en plein dedans. Beaucoup d’autres pochettes suivront, et le jeune graphiste du comté de Durham va se retrouver à illustrer, pour le compte du label indé londonien le plus célèbre des 80’s, quelques-uns des plus fameux disques de la décennie, et même de la suivante.

23 Envelope

Âgé de 26 ans, et afin de donner un cadre plus formel à cette nouvelle collaboration solide, il fonde, avec le photographe et vidéaste Nigel Grierson l’entité 23 Envelope. C’est avec lui qu’il créera, jusqu’en 1988 (date à laquelle Nigel partira vers d’autres horizons, et où il fondera en compensation le studio v23), les bases de la patte 4AD, et de ces pochettes qui suggèrent des atmosphères, entrouvrent des portes, des fenêtres, en referment d’autres, offrent une parcelle entre le monde du concret et celui de l’à-peu-près. Une vision surréaliste et quasiment inconsciente de la musique en somme et l’une des meilleures manifestations de ce fantasme, que beaucoup, à cette époque, ont vécu pour de vrai. Écouter la musique. Regarder la pochette que l’on tient entre ses mains. Dériver. Et répéter le rituel, encore et encore.

Lui veut creuser la musique, voir ce qu’il y a derrière, dedans, à l’origine, après. Rapidement, et quand on fouille un bac à vinyles chez un disquaire — et bientôt un bac à CD, transformation qui plongera Oliver dans une profonde mélancolie et occasionnera une vraie remise en question personnelle de son travail —, qu’il s’agisse d’un groupe de shoegaze britannique ou d’une compilation racontant le Mystère des Voix Bulgares (la curieuse mais pertinente incursion du label dans les musiques folkloriques balkaniques, en 1986), on sait que c’est 4AD, et sans même encore avoir aperçu le logo aux trois caractères et aux deux couleurs. Une compréhension innée, pour Oliver, de ce que veulent les groupes et de la meilleure manière de les mettre en valeur ?



Une proximité avec les groupes en question, surtout, qui explique d’emblée ce lien indicible mais évident entre la musique et les visuels. Au sein d’une période où ne sortent pas encore 30 disques par semaine, et où la musique se consomme, non pas via des plateformes de streaming sur lesquelles on change de morceaux en même temps que d’humeur, mais sur ces platines que l’on doit retourner au bout de 25 minutes, le rapport à l’écoute, naturellement, est autre, et le rapport à la création aussi. On va moins vite, l’urgence peut attendre. Le plus souvent, Vaughan récupère les démos des albums en cours de fabrication. Il a parfois accès à une, deux, trois versions d’un album qui sortira quelques mois plus tard dans une version encore différente. Observateur privilégié du processus de création toujours immensément complexe d’un disque, il en est aussi l’un des acteurs. Toujours, et au cours des entretiens qu’il a pu accorder au cours de sa carrière, il a tenu à préciser l’implication des groupes dans cette création visuelle, et le rôle de la discussion collective au service d’une réflexion globale.

“Doolittle”

Un portrait de Mozart devenu épouvantail pour accompagner le Scarecrow (1984) de The Wolfgang Press. Une brosse à dents rouge (et sans dentifrice) entourée de crucifix catholiques pour le disque éponyme d’Ultra Vivid Scene (1988). Le portrait, pas immédiatement visible, d’une fille, aux côtés d’une cicatrice largement suggérée pour Scar (1989), l’album de Lush. Et puis pour Vaughan, bientôt, le chef-d’œuvre ou du moins, la pièce maîtresse de sa collection, qui joindra bientôt celle de beaucoup d’autres adolescents, jeunes adultes et mélomanes des années 90 et des suivantes. Transformer la musique en objet, en lui accordant une dimension physique. C’est l’idée. C’est ce qu’il parvient à faire : “Pour moi, la musique n’est vraiment qu'une formule mathématique”, lui dit un jour Frank Black, alias Charles Thompson des Pixies, alors qu’il passe une nouvelle fois du temps en studio à écouter, à comprendre, à discuter de ce qui se passe et de ce qui va se passer. La formule, pour lui, est un choc, une démystification de l’artiste maudit qui fait avant tout parler le cœur, et une idée, juste derrière, qui donnera naissance à l’une des pochettes les plus emblématiques de la décennie 80.

Les mathématiques lui évoquent la Renaissance, Léonard De Vinci, les formules que l’on ne comprend que lorsque l’on y est savamment initié. Sur les démos qu’il a eues l’occasion d’écouter, il y a ce morceau qui parle d’un singe qui vient d’être aspiré dans un trou, direction le Paradis, et qui deviendra le titre Monkey Gone to Heaven. Pour la pochette du disque à venir — qui a failli s’appeler Whore (Putain, en français) mais qui est finalement devenu Doolittle —, il représente donc ce singe ornementé d’une auréole et entouré de quelques chiffres – 5, 6 et 7 – comme si le petit primate était sur le point de débuter, lui aussi, l’énonciation d’une formule mathématique érudite. Désormais accompagné du designer Christopher Bigg et du photographe Simon Larbalestier, ils sortent en 1989 cette pochette en forme de bestiaire bizarre et qui occasionnera un impact curieux : quand on songe aux Pixies et à cet album (l’indéniable plus grand succès du groupe), on songe instinctivement au singe savant, avant même de songer au Chien andalou surréaliste de Buñuel et de Dali, hurlé sur le single Debaser.



Dali, encore, et chez les Pixies cette fois ? Le groupe et le designer étaient décidément faits pour se rencontrer. Ils ne se lâcheront plus, et même après qu’Ivo Watts-Russel a vendu, en 1999, ses parts dans 4AD à Beggars Group (comme le groupe se nomme désormais). Vaughan Oliver illustrera ainsi toutes les pochettes du groupe de Boston, de la planète rougeoyante aux anneaux saturniens de Bossanova (1990) au trompe-l’œil de Trompe le monde (1991), en passant par celle, décousue, de Head Carrier (2016).

Pendant opposé d’un Peter Saville (Factory Records) cérébral aux créations géométriques — l’autre designer britannique en vogue de l’époque —, Vaughan Oliver revendiquera pour sa part, plutôt, l’idée de la création “viscérale”. Et celle du plaisir, avant tout, pourvu de cette volonté systématique de faire les choses d’une manière un tant soit peu différente des autres. Le punk est passé par là, et Vaughan a retenu la leçon du do-it-yourself, du “fait ce que tu as envie de faire”. Développer sa propre entreprise, aller chercher d’autres clients, plus prestigieux encore ? Lui, assumait plutôt, et pendant plus de vingt ans (après 99, il se détache progressivement du label, mais continue à illustrer des disques, et même à enseigner à l’Université) avoir avant tout fait des pochettes pour illustrer sa propre collection de disques. C’est l’avantage lorsque l’on travaille pour une structure indé, et pas pour une très grande maison.



“Sans Vaughan, 4AD ne serait pas 4AD, et ce n'est pas peu dire lorsqu'on affirme que son style a également contribué à l'art du graphisme en général à la fin du XXe siècle” a écrit la semaine dernière Ivo Watts-Russell au moment de l’annonce de son décès. Un genre de visionnaire, Vaughan Oliver ? Lui balayait d’un revers de la main les éloges de la sorte. Ses travaux évanescents et vaporeux pour Cocteau Twins ? Ses portraits gothiques et fascinés pour This Mortal Coil ? Ceux, colorés mais fracassés, pour de The Breeders ? Puis, plus tard, ses collaborations avec Scott Walker, TV on the Radio, ou encore David Lynch ? Non les artistes, c’étaient ceux dont il illustrait les disques, pas lui.

À l’histoire, désormais, d’en juger. Et celle-ci semble, déjà, avoir son avis sur la question.

Même "Vanity Fair", le "New-York Times" (entre-autres) se sont aussi fendus d'un article.


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Message  Pierre Mar 2 Juin - 0:58

Donc, le meilleur moyen de connaître ce projet fantastique, c'est de l'écouter car il me paraît très difficile de décrire ce concept musical. L'idée de départ est venue à l'esprit d'Ivo Watts-Russell (le concepteur de 4AD, à l'origine Beggar's Banquet): réunir les différentes signatures de sa jeune écurie (Cocteau Twins, Dead Can Dance, Colourbox, Cindy Talk, The Wolfgang Press, Modern English, XMal Deutschland, Howard Devoto)- groupes pour la plupart confidentiels à part Cocteau Twins qui ont commencé à faire parler d'eux dans le cercle indépendant- autour de reprises d'artistes des années 70 comme Tim Buckley ou Roy Harper, et quelques créations originales des artistes, du concepteur et du producteur. Brendan Perry et Lisa Gerrard de Dead Can Dance ont refusé de se prêter au jeu de la reprise, ils ont juste accepté de se joindre à Simon Raymonde, nouvellement intégré à Cocteau Twins, pour un instrumental, les deux autres titres étant signés Lisa Gerrard. Le tout sera habillé des arrangements de cordes de Martin McGarrick qui sera intégré beaucoup plus tard au sein de Siouxsie & the Banshees. L'idée était de proposer une sorte de "catalogue" des artistes du label en évitant la facilité d'une simple compilation.
Pour donner une identité à ce collectif bancal et multiforme, Ivo-Watts Russell confie l'esthétique du projet à Vaughan Oliver, designer de 23Enveloppe qui deviendra décisif dans l'image de 4AD. C'est Pallas Citroën, la compagne d'Ivo Watts-Russell qui posera pour la pochette, devenant par la suite le "visage" de This Mortal Coil, alors qu'au départ, TMC n'est qu'un concept sans lendemain. Ce n'est que 3 ans plus tard qu'Ivo Watts-Russell décide de reprendre le concept pour présenter de nouveaux artistes signés sur le label.
D'ailleurs, le projet de départ n'était prévu que pour un single regroupant deux titres mêlés de Modern English "Sixteen Days/ Gathering Dust" sur lesquels s'étaient ajoutés des membres de Cocteau Twins, Colourbox et Cindytalk. On demande à Liz Fraser et Robin Guthrie de CT d' enregistrer une reprise de Tim Buckley "Song to the Siren" pour la face B. Contre toute attente, ce sera la face B qui créera la sensation et sera classé dans les charts. Et c'est probablement à partir de ce succès inespéré que germera le projet d'un album.

Comment définir l'identité musicale du projet? Tous les musiciens impliqués sont issus du mouvement post-punk/New-Wave (on est en 1983 pour le single, 84 pour l'album), mais le style est intemporel et difficilement définissable, entre les arrangements de cordes, la sobriété et la lenteur des titres, l'originalité de certaines instrumentations (le Yang T' Chin et l'accordéon de Lisa Gerrard) et autres expérimentations (plus présents dans les deux albums suivants) qui confèrent à l'ensemble une tonalité extrêmement mélancolique et romantique, "gothique" aux yeux de certains chroniqueurs qui tiennent absolument à intégrer ce projet dans un mouvement naissant, initié par Bauhaus et Siouxsie & the Banshees. Cocteau Twins et Dead  Can Dance en feront les frais puisqu'ils seront, eux aussi, "estampillés" de la même façon...Rolling Eyes  
Pourtant, à l'écoute de ces albums, on ne peut s'empêcher de songer à l'univers qui secoua le romantisme victorien, celui des soeurs Brontë, de Mary Wollstonecraft-Shelley ("Frankenstein"), de Bram Stoker ("Dracula"), des Préraphaélites qui, pour le coup, introduisaient effectivement une dimension gothique à leurs oeuvres. On peut y entendre le bruit du vent, des orages, des vagues, des comptines quelque-peu inquiétantes, des accents celtiques, un orientalisme diffus et surtout toutes ces voix éthérées, diaphanes, spectrales, belles à pleurer, pour la plupart féminines (surtout dans "Blood, le 3e album). Et l'univers visuel (pochettes, clips) qui accompagne l'univers sonore ne fait qu'accuser ces références. Alors "gothique", oui, mais dans la grande tradition artistique du 19e siècle, rien à voir avec les corbeaux qui ont assombri le paysage musical de la seconde moitié des années 80!

Le meilleur moyen de se faire une idée, c'est d'écouter ces albums réellement passionnants dans leur intégralité, et chronologiquement pour juger de l'évolution de ces 3 merveilleux albums qu'on peut aussi raisonnablement associer au mouvement "progressif" (les vieux albums du Floyd par exemple. Syd Barrett fait partie des songwriters repris).

J'ai trouvé un site de streaming qui propose l'intégralité des albums, y compris le cd bonus de raretés inclus dans le magnifique coffret des remasters sorti en 2011). Il suffit de descendre un peu et appuyer sur "Play all". En plus, le son est très bien et les textes des chansons défilent façon karaoké sur le player en bas! Pour chacun des albums, la photo de la pochette (clic droit, afficher l'image pour la voir en grand, ça vaut le coup!):

"It'll end in tears"-1984:

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Streaming





"Filigree & Shadow"- 1986: (double album)

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Streaming

"Blood"- 1991: (double album)

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Streaming



"Dust & Guitars"- 1983/1991: (cd bonus singles +inédits

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Streaming



(inédit inclus dans la compilation 4AD "Lonely is an Eyesore", magnifique objet proposant des inédits de différents artistes du labels dont je parlerai plus tard...)

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Message  Pierre Mar 1 Juin - 10:00

Je viens de tomber sur une reaction-video pour le coup vraiment intéressante puisqu'il s'agit d'y opposer la version originale de son créateur Tim Buckley et la reprise de This Mortal Coil par la voix magnifique de Liz Fraser. Il s'agit bien entendu de "Song to the Siren"! Wink



Au delà d'en faire une compétition quasi impossible à en déterminer un vainqueur (les avis des deux participants diffèrent d'ailleurs!), je trouve qu'il est préférable de comparer ce que chacune des deux versions apporte, et pour cela, il me semble que c'est le texte qui va rendre le challenge particulièrement intéressant:

Song to the Siren

Long afloat on shipless oceans
I did all my best to smile
'Til your singing eyes and fingers
Drew me loving to your isle
And you sang
Sail to me, sail to me
Let me enfold you
Here I am, here I am
Waiting to hold you

Did I dream you dreamed about me?
Were you here when I was full sail?
Now my foolish boat is leaning
Broken lovelorn on your rocks
For you sing
Touch me not, touch me not
Come back tomorrow
Oh my heart
Oh my heart shies from the sorrow

Well I'm as puzzled as the newborn child
I'm as riddled as the tide
Should I stand amid the breakers?
Or should I lie with death my bride?
Hear me sing
Swim to me, swim to me
Let me enfold you
Here I am, here I am
Waiting to hold you

Car ce texte, particulièrement poétique, romantique et pourtant tragique illustre si bien la dimension destructrice que peut parfois revêtir une relation amoureuse toxique à travers le mythe de la sirène... Il s'agit d'une sorte de dialogue entre un bourreau malgré elle et sa victime consentante. Chacun sait qu'il n'y a aucun espoir dans cette union qui causera la mort de celui qui accepte de succomber à cette séduction funeste et qui ne causera que désolation et regret à celle dont le destin est de détruire celui qu'elle attire... Un des mythes les plus funestes.

Dans le cas de la chanson originale, c'est la réflexion de l'homme qui sait ce qui va lui en coûter, mais qu'il accepte. Cependant, la reprise dramatise encore davantage la situation puisque c'est la Sirène elle-même, celle qui doit survivre, qui s'exprime. Perso, je trouve que c'est encore plus cynique tragique.

Mais le plus cynique dans toute cette histoire, c'est la réalité qui va dépasser la fiction: Tim Buckley, le créateur, mourra dans cette vague d'overdoses qui a eu raison de bien des artistes des années 70. On pourrait établir une relation de similarité entre la relation toxique et autodestructrice avec la sirène et celle qu'on peut entretenir avec les drogues dures.
Mais pire encore dans le genre "coïncidence troublante" (concept si cher à KB!): On sait que Jeff Buckley (le fils) a eu une liaison avec Liz Fraser (ils enregistreront d'ailleurs un duo ensemble) qui avait donc repris la chanson de son père. Peu de temps après leur rupture, il meurt noyé dans des circonstances assez inexpliquées, le jour même où elle enregistre "Teardrop" pour Massive Attack.
Voici ce qu'elle déclara plus tard:
"That was so weird ... I'd got letters out and I was thinking about him. That song's kind of about him – that's how it feels to me anyway."

Alors pour terminer en musique: ce fameux duo Buckley/Fraser:



La version Live de This Mortal Coil (Liz Fraser+Robin Guthrie):



Et la version live de Tim Buckley de "Song to the Siren":



C'est curieux. Quand j'ai entendu la version originale il y a très longtemps, je la trouvais particulièrement aride et austère comparée à la somptueuse version de TMC. Maintenant, même si je lui préfère toujours la reprise, je la trouve tout à fait bouleversante, surtout dans la version studio.

Un parallèle assez similaire peut être établi entre le "Another Day" de Roy Harper et la reprise de TMC (toujours Elizabeth Fraser) puisqu'on a la vision de la rupture d'un couple selon la perspective d'un homme ou d'une femme, mais là, on a aussi cette confrontation sous la forme d'un dialogue entre l'homme et la femme dans la version Peter Gabriel/KAte Bush:







Avec de belles chansons et de grands artistes, l'exercice de la reprise peut devenir qq-chose de vraiment noble, non?Wink

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